| Les
  manuscrits des anciens – deuxième 
  partie ©Lorena
  Bettocchi 1936-1955 :  Des  
  manuscrits  prennent forme
  autour d’Arturo Te-ao Tori,   secondé de Juan Araki et de
  Gabriel Veri-veri. | |
| Arturo Te-ao, neveu de Barnabé
  Tori  et Gabriel Veri-veri,
  neveu de Tomenika Tea-tea (à droite) 
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        N’oublions pas les premiers Pascuans
  qui ont tenté l’impossible, furent également aidés des femmes : Catalina
  Tori, Parapina Vaka, Angata Vari Tahi, Mariana Pakomio.     
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|           En effet, entre 1871 et 1914, le
  rongorongo représentait le souvenir des rituels sacrés, tapu, des temps
  glorieux du Roi Nga-ara et de la tribu Miru de Anakena. Et si Ramon te Haha
  le conta si bien à Katherine Routledge, il dut le conter également durant les
  fêtes annueles Paina,  à la gloire de
  Tu’u Maheke fils de Hotu Matua.  Et  son neveu Gabriel Veri-veri dût noter ces
  rituels anciens.  Gabriel homme intelligent,
  apprit très vite à lire et écrire. Il mit ses compétences au service de
  lépreux et de la communeauté pascuane, nota sur des cahiers d’écoliers tous
  les trésors, la flamme de leur connaissance. Il fut contaminé à son tour et
  écrivit jusqu'à ne plus avoir de mains…     Arturo Te-ao Tori était déjà
  recensé parmi les lépreux en 1919. Gabriel non.  Né au début du siècle  il avait 14 ans,lorsqu’ il dessina des
  signes  rongorongo devant  Katherine Routledge qui passait dans la
  maison de sa tante.  Il se rendit
  compte que des étrangers écrivaient des notes et des  informations sur leur ancienne
  écriture.  Alors, avec beaucoup plus de
  talent, il en fit autant.  Qui leur avait enseigné l’écriture ? Le  premier 
  maître d’école fut   Pakomio
  Maori Ure Kino né en 1826. Il avait été instruit dans une ferme au Pérou.
  Notons que le vaillant Pascuan, rescapé de l’esclavage s’était échappé des
  mines d’extraction des phosphates et fut l’un des 15 survivants qui revinrent
  sur leur île. Il enseigna cette nouvelle manière d’écrire à sa femme Angata,
  de 30 ans plus jeune qui lui et à son ami Parnabé Tori, né en 1824. Ils
  n’avaient pas d’école mais ils furent les premiers instituteurs.  Et le plus jeune des hommes Ure Po Tahi fut
  instruit à Tahiti par Monseigneur Tepano Jaussen pour faire de lui son
  premier catéchiste Rapanui.  Maria Atan
  Pakomio la fille d’Angata et Andes Teave (Chavez) Manu-Ara furent les deux
  premier instituteurs officiellement recensés en 1929.  L’apprentissage de
  l’écriture occidentale se fit sans problème et à l’intérieur d’un groupe
  d’initiés, cela fut l’outil indispensable pour   continuer 
  le rongorongo de l’époque sur manuscrits.        Les ateliers sur la tradition orale prirent forme
  en 1936 au grand ravissement du Père Sébastien Englert qui  encouragea l’initiative sans trop
  comprendre de quoi il en retournait sur le rongorongo. Quoiqu’il fut
  linguiste, il n’eut pas l’occasion de reconnaître un atlier de correction du
  répertoire de l’Evêque d’Axieri. A mon sens, jamais il ne fut en présence des
  quatre documents que j’ai découvert… L’année précédent l’arrivée du Capucin,
  lorsqu’Alfred Métraux interrogea les Pascuans sur leur ancienne écriture, à
  l’aide de ce répertoire de Monseigneur Tepano Jaussen, publié après sa mort
  en 1893,  Métraux eut moins de chance
  que Katherine Routledge. Avec l’aide de ce livret, lui et Lavachery
  questionnèrent les Pascuans. Juan Tepano ne connaissait rien du rongorongo ou
  ne voulut pas s’en mêler. De l’ancien Tomenika a Tea Tea il n’avait hérité
  que de son herminette. Les Veri-veri et les Te-ao ne donnèrent aucune
  indication concrète. Alfred Metraux et Lavachery ne visitèrent pas souvent
  les lépreux, par contre ils furent les « fixeurs » du cinéaste  qui les accompagnait et le conduisirent à
  la léproserie. Les prises de vue sur le visage des jeunes et des enfants
  lépreux sont révoltantes et bouleversantes. 
  Se doutaient-ils  que parmi eux
  il y avait les fidèles gardiens de l’unique ancienne écriture de
  l’Océanie ?  Certainement
  pas.   Après leur départ, Métraux
  publia alors que les Pascuans ne savaient plus rien de leur écriture.
  Mais  il  leur laissa « le répertoire des signes
  boustrophédon des bois d’hibiscus intelligents »  ce petit fascicule si précieux pour eux qui
  avaient perdu leurs signes et la grande récitation.  Il n’y eut entre le Suisse et les Rapanui
  aucune osmose en la matière.  Car les
  Rapanui travaillèrent en secret. 
  Cependant, il est à noter que Lavachery découvrit la fabrication de
  pierres avec une écriture semblable au rongorongo, tous objets destinés au
  troc et à la vente. (Ceci fera l’objet d’une page  particulièrement dédiées aux pierres). Les
  ateliers  sur le rongorongo restèrent
  secrets, entre Pascuans. Personne ne fut mis au courant.       Juan Araki apporta ses connaissances en
  astronomie, transmises par son grand-père Araki Tia Pu Ara Hoa a Rapu.
  Parapina Vaka donna tout ce qu’elle savait sur la tradition orale à Gabriel
  et Matteo Veri-veri. Bref ces précieux manuscrits, banques de données
  inespérées,  furent conservés dans les
  modestes maisons au toit de totora, à la léproserie, à l’humidité… Ces
  documents étaient uniques et précieux pour ces hommes et ces femmes qui
  avaient tout perdu et qui commençaient à retrouver leurs
  traditions passées. Nous allons voir pages suivantes la valeur de ceux que
  j’ai découverts en linguistique, morphologie et épigraphie.      C’est Thor Heyerdahl, qui curieux des
  aku-aku,  objets fétiches rapanui,  approcha Esteban Atan, de la famille du
  dernier roi rapanui, Atamu te Kena. Il en avait dans la grotte
  familiale.  Estéban Atan, devant
  l’intérêt de Thor Heyerdahl pour une pierre fabriquée avec certains signes de
  son manuscrit, lui céda la pierre et lui 
  présenta timidement un cahier, le document source en quelque sorte,  écrit par Gabriel Veri-veri à la mémoire de
  Ure Vae Iku, cet ancien qui  L’archéologue
  norvégien prit la peine de photographier le manuscrit, et il fit bien.  Esteban 
  Atan préparait son évasion.         En 1955, les Pascuans étaient assignés à
  résidence. Et une série d’évasions pour la terre promise de Tahiti se
  préparait. Estéban Atan fomenta la première évasion avec quatre autres
  camarades et selon sa veuve la Esperanza, il emporta le manuscrit avec lui.        Sa fille Maria est l’héritière des
  images de ce manuscrit. Il porte une date sur un calendrier lunaire : he
  maro 1936. 
     Thomas Barthel, qui dès 1954 avait  terminé sa visite à tous les musées afin de
  relever les signes et élaborer son catalogue des signes rongorongo et  des tablettes,  s’intéressa aux manuscrits des
  Anciens.  Il les nomma les manuscrits
  de Old Ones. Il nous présenta toute
  la série des photographies dans la publication de Thor Heyerdahl Reports of the Norwegian Archaeological Expedition to Easter Island
  and the East Pacific,   Vol. II.  Mais il n’en fit
  point l’analyse  terminale. Son enquête
  sur les manuscrit était encore incomplète et malgré mes découvertes le sera
  encore. Cependant Barthel nous donna des indications sur les familles qui
  avaient participé à ces manuscrits, annonçant 
  qu’une prochaine publication donnerait des renseignements
  complémentaires.  Il nous les fournit
  dans son ouvrage The Eigth Land publié en 
  1978 à Honolulu.    Je passerai sur tout ce qui
  est tradition orale, car il rencontra le manuscrit de Pua ara oha.  Je ne crois pas que l’ancien, qui avait 72
  ans au moment de la visite de Katherine Routledge ait été l’auteur du livret.  Par contre, les Pascuans m’ont certifié que
  Juan Araki le fit  rédiger   à 
  la mémoire de son grand-père 
  astronome.    Thomas
  Barthel analysa en épigraphie les manuscrits de Old Ones | |